Quelles sont les personnes qui viennent consulter un psychogénéalogiste ?
Cette question posée ouvre sur une large réflexion : la complexité de l’Humain est d’être à la fois un individu unique tout en étant (consciemment et inconsciemment) le réceptacle d’autres individus, un enchevêtrement d’histoires qui se croisentet participent à la construction de chacun.
Prenons l’exemple de Mme D[1]
Mme D, âgée de soixante trois ans, consulte pour « un mal être diffus et constant, pourtant j’en ai vu des psy… du psychologue au psychanalyste en passant par le comportementaliste, et autres thérapies brèves… je n’en peux plus ! J’ai tout pour être heureuse, je ne comprends pas ! »
Oui Mme D. a tout pour être heureuse, comme chaque personne qui est en capacité de se nourrir et de se chauffer. Pourtant elle n’accède pas à son bonheur. Elle vit avec une certaine morosité constante, sa vie est terne, elle se trouve passive et accompagnée de pensées souvent négatives qui tournent en boucle dans sa tête.
Elle relate son histoire familiale avec peu d’entrain car elle n’y croit pas vraiment (à la psychogénéalogie).
Il n’y a pas de drame personnel, ses parents sont présents, elle est fille unique.
Fille unique ? Pas de drame ? En « montant son arbre généalogique » et sans aller très haut dans les générations, il y a cette enfant morte à la naissance, une petite sœur. Au moment du drame, Mme D avait 7 ans. Peut-elle en parler ? Non, elle ne se souvient de rien, elle ne se souvient que de sa mère enceinte, de cette attente d’avoir une petite sœur, de sa mère qui revient de l’hôpital seule, de ce berceau vide.
Où est-elle cette petite sœur ? Elle ne le sait pas, personne ne lui a jamais rien dit, le drame est passé sous silence, tabou, on n’en parle pas car cela fait mal !
Mme D se trouve bien malgré elle confrontée à l’incapacité de ses parents à gérer un évènement trop douloureux.
Et de ce lourd silence, un silence assourdissant de non-dits, de questionnements, d’incompréhension totale, il en résulte unberceau vide, une absence qui ne se comblera jamais car le deuil ne se fait pas, le deuil n’a pas le droit de se faire, l’émotionnel est caché, pas de larmes, pas de cris. Du silence. Et l’absence.
L’absence et son pouvoir sacré pèsent lourd dans l’inconscient, plus lourd que toute présence bien installée. Le cerveau del’enfant s’est arrêté à cet instant dans l’attente « une petite sœur doit arrivée ». Le cerveau n’aura jamais de réponse à cette petite sœur qui ne vient pas.
Ce vide qui ne sera jamais comblé devient un vide permanent que Mme D. subit encore aujourd’hui.
Après cette prise de conscience, il faut ensuite donner une réponse au cerveau pour qu’il sorte de cette attente : faire un acte symbolique pour terminer l’histoire, le berceau vide doit sortir du silence pour aider Mme D. à faire ce deuil qui n’a jamais pu être réalisé au moment du drame.
Ici c’est un exemple de deuil non fait qui est à la source du mal-être de Mme D.
La psychogénéalogie, ce n’est pas simplement un diagnostique. C’est poser des mots sur les maux, mettre en conscience une histoire familiale souvent orchestrée « d’erreurs humaines », ou plutôt de réactions très subjectives en fonctions des aléas de la vie et des croyances induites.
C’est une analyse des liens transgénérationnnels pour sortir de loyautés qui empêchent toute individualité, une mise en conscience de l’inconscient familial et individuel pour libérer les charges émotionnelles par une action dans le présent.
L’action (par l’acte symbolique) permet d’ancrer la prise de conscience et de guérir la personne de ses maux.
La psychogénéalogie s’adresse à toute personne souffrant de peurs, de blocages, d’insécurité, de profonde dévalorisation, de conflits psychiques incompréhensibles, de blessures existentielles… elle s’adresse à toute personne dont la volonté est de changer de regard sur son destin pour se positionner pleinement dans son authenticité.
[1] Cet exemple est un très court résumé d’un travail effectué sur une année
Caroline Bablon